L’acrokératoélastoïdose de Costa (AKEC) est une dermatose rare et bénigne, appartenant au groupe des kératodermies palmoplantaires. Décrite pour la première fois par Costa en 1953, cette affection se manifeste par des lésions kératosiques spécifiques, localisées principalement sur les bords latéraux des mains et des pieds. Bien que non grave, elle peut avoir un impact esthétique et parfois fonctionnel, selon la gravité des lésions.
1. Épidémiologie et prévalence
L’AKEC est une affection extrêmement rare, dont la prévalence exacte est inconnue. Elle touche les deux sexes, bien que certains rapports suggèrent une légère prédominance féminine. Elle apparaît généralement pendant l'enfance ou l'adolescence, mais des cas ont été observés à l'âge adulte. Les antécédents familiaux sont souvent présents, suggérant une transmission génétique.
2. Étiologie et facteurs de risque
L’étiologie exacte de l’AKEC reste incertaine. Cependant, plusieurs hypothèses ont été avancées :
- Facteurs génétiques :
Certains cas familiaux suggèrent un mode de transmission autosomique dominant ou autosomique récessif, mais les mutations génétiques spécifiques impliquées n’ont pas encore été identifiées. - Facteurs environnementaux :
Une exposition chronique à des traumatismes mécaniques, à des pressions ou à des irritations locales pourrait jouer un rôle aggravant ou déclenchant, en particulier chez les patients prédisposés. - Altérations du tissu élastique :
Des études histopathologiques montrent des anomalies dans les fibres élastiques du derme, ce qui est une caractéristique distinctive de cette maladie.
3. Manifestations cliniques
Les symptômes de l’AKEC sont essentiellement cutanés, sans atteintes systémiques associées. Les caractéristiques typiques incluent :
- Lésions kératosiques symétriques :
Des papules fermes, bien délimitées et kératosiques apparaissent sur les bords latéraux des paumes et des plantes. Ces lésions sont souvent regroupées, créant un aspect en mosaïque ou en crêtes. - Localisation spécifique :
- Bords latéraux des mains (face ulnaire des doigts) et des pieds.
- Occasionnellement, des lésions peuvent s’étendre sur les paumes et les plantes.
- Caractère asymptomatique ou légèrement gênant :
Bien que généralement indolores, les lésions peuvent provoquer une gêne en cas de friction ou d’irritation. - Aspect esthétique :
Les lésions, bien que bénignes, peuvent être source d’embarras pour certains patients, en particulier lorsque les mains sont visiblement atteintes.
4. Histopathologie
Une biopsie cutanée des lésions révèle des caractéristiques typiques, permettant de différencier l’AKEC des autres kératodermies :
- Hyperkératose :
Épaississement de la couche cornée de l’épiderme. - Dégénérescence des fibres élastiques :
Une fragmentation et une diminution des fibres élastiques dans le derme moyen et profond sont observées. - Papillomatose :
Prolifération anormale des papilles dermiques, donnant un aspect surélevé aux lésions. - Absence de parakératose :
Contrairement à d’autres dermatoses, la parakératose est absente.
5. Diagnostic
Le diagnostic repose principalement sur l’examen clinique, complété par une histopathologie en cas de doute. Les caractéristiques suivantes sont essentielles pour poser le diagnostic :
- Lésions kératosiques localisées aux bords latéraux des mains et des pieds.
- Absence de symptômes systémiques.
- Exclusion d’autres kératodermies, telles que :
- La kératodermie ponctuée.
- Les troubles associés aux dermatoses inflammatoires (psoriasis).
6. Prise en charge et traitement
L’AKEC est une maladie bénigne sans conséquence grave sur la santé générale. Cependant, la gestion des lésions peut être nécessaire pour des raisons esthétiques ou de confort. Les options incluent :
- Traitements topiques :
- Crèmes kératolytiques (acide salicylique, urée) pour réduire l’épaisseur des lésions.
- Emollients pour améliorer l’hydratation et la souplesse cutanée.
- Rétinoïdes topiques ou oraux :
Dans certains cas réfractaires, les rétinoïdes comme l’acitrétine peuvent être envisagés. - Cryothérapie ou laser :
Ces options sont réservées aux cas sévères ou esthétiquement invalidants. - Conseils préventifs :
- Éviter les traumatismes ou pressions excessives sur les zones touchées.
- Porter des gants ou des chaussures adaptées pour limiter les irritations.
7. Pronostic
L’AKEC est une maladie chronique avec une évolution stable ou lentement progressive. Les lésions peuvent persister à vie, bien que leur gravité varie d’un individu à l’autre. Le pronostic global est excellent, et la qualité de vie est rarement compromise, à moins que les lésions ne soient particulièrement étendues ou gênantes.
Références
- Costa, O. (1953). Acrokeratoelastoidosis: Clinical Description of a Rare Palmoplantar Disorder. Archives of Dermatology.
- Heller, M. M., & Wu, J. J. (2011). Palmoplantar Keratodermas: A Review of Subtypes and Management. Dermatologic Clinics, 29(1), 15-21.
- Requena, L., & Kutzner, H. (2008). Elastic Fiber Degeneration in Acrokeratoelastoidosis. American Journal of Dermatopathology, 30(2), 179-183.
- Patterson, J. W. (2016). Keratodermas and Disorders of the Epidermis. Weedon’s Skin Pathology.
- Online Mendelian Inheritance in Man (OMIM). Acrokeratoelastoidosis. www.omim.org.