Syndrome de congestion pelvienne (SCP)
Introduction
Le syndrome de congestion pelvienne (SCP) est une cause fréquente mais sous-diagnostiquée de douleurs pelviennes chroniques, affectant principalement les femmes en âge de procréer. Cette affection est due à une dilatation et une insuffisance des veines pelviennes, entraînant une stase veineuse et des symptômes douloureux.
Épidémiologie
- Le SCP représente jusqu'à 30 % des cas de douleurs pelviennes chroniques chez les femmes.
- Il est principalement observé chez les femmes entre 20 et 45 ans, avec une prévalence plus élevée chez celles ayant des grossesses multiples.
- Rare chez les femmes ménopausées, sauf en cas de conditions pathologiques sous-jacentes, telles que des anomalies veineuses congénitales.
Physiopathologie
Le SCP résulte d’une insuffisance des valves des veines pelviennes, conduisant à une dilatation veineuse excessive et une stase sanguine.
Les mécanismes principaux incluent :
- Insuffisance valvulaire :
- Les valves des veines ovariennes deviennent dysfonctionnelles, entraînant une dilatation des veines ovariennes et utérines.
- La stase sanguine provoque une pression accrue, conduisant à une irritation nerveuse et une inflammation locale.
- Grossesse :
- Les grossesses multiples augmentent le risque, car la grossesse entraîne une augmentation du débit sanguin pelvien et des modifications hormonales qui affaiblissent les parois veineuses.
- Compression extrinsèque :
- Par exemple, le syndrome de Nutcracker (compression de la veine rénale gauche par l’aorte et l’artère mésentérique supérieure) peut contribuer à la congestion pelvienne.
Symptômes cliniques
Les manifestations du SCP sont variées et souvent confondues avec d'autres pathologies gynécologiques ou digestives :
- Douleurs pelviennes chroniques :
- Localisées dans le bas-ventre, augmentant après des périodes prolongées en position debout ou assise.
- Soulagées en position couchée.
- Douleurs post-coïtales (dyspareunie) :
- Souvent décrites comme une douleur sourde ou pesante dans la région pelvienne.
- Troubles menstruels :
- Dysménorrhée (douleurs menstruelles) et règles abondantes.
- Syndrome prémenstruel exacerbé :
- Les symptômes, y compris les douleurs pelviennes, s’intensifient avant les menstruations.
- Autres symptômes :
- Gonflement pelvien, sensation de lourdeur, varices vulvaires ou périnéales, et parfois des troubles urinaires ou digestifs.
Diagnostic
Le SCP est souvent difficile à diagnostiquer en raison de la similitude de ses symptômes avec ceux d'autres affections pelviennes.
1. Anamnèse :
- Recherche de douleurs pelviennes chroniques, surtout si elles sont aggravées en fin de journée ou après un effort.
2. Examen clinique :
- Palpation pelvienne douloureuse.
- Présence possible de varices vulvaires ou périnéales.
3. Imagerie :
Les examens d’imagerie sont essentiels pour confirmer le diagnostic.
- Échographie pelvienne transvaginale :
- Visualisation de veines pelviennes dilatées (> 6 mm de diamètre).
- Doppler utile pour évaluer le reflux veineux.
- IRM pelvienne :
- Permet de détecter les veines dilatées et d’exclure d’autres causes de douleurs pelviennes.
- Phlébographie pelvienne :
- Gold standard pour confirmer la présence d’une congestion veineuse.
- Angioscanner ou angio-IRM :
- Utile pour détecter des syndromes associés comme le syndrome de Nutcracker.
Diagnostic différentiel
Le SCP peut être confondu avec :
- Endométriose.
- Maladie inflammatoire pelvienne.
- Fibromes utérins.
- Adénomyose.
- Syndrome du côlon irritable.
Traitement
1. Traitement médical
- AINS (anti-inflammatoires non stéroïdiens) :
- Réduisent la douleur et l’inflammation locale.
- Médicaments veinotoniques :
- Comme la diosmine et l’hespéridine, qui renforcent les parois veineuses et améliorent le retour veineux.
- Inhibiteurs hormonaux :
- Les analogues de la GnRH ou les contraceptifs hormonaux peuvent réduire le flux sanguin pelvien en supprimant l’ovulation.
2. Traitement interventionnel
- Embolisation des veines pelviennes :
- Technique mini-invasive consistant à occlure les veines ovariennes dilatées avec des agents emboliques.
- Taux de succès élevé (70 à 85 % d’amélioration des symptômes).
- Sclérothérapie :
- Injection d’un produit sclérosant pour rétrécir les veines dilatées.
3. Traitement chirurgical
- Indiqué en dernier recours, lorsqu’une embolisation ou un traitement médical échouent.
- Ligation des veines ovariennes ou hystérectomie avec salpingo-ovariectomie bilatérale dans les cas graves.
4. Prise en charge globale
- Physiothérapie pelvienne :
- Utile pour soulager les douleurs et améliorer la circulation sanguine.
- Modifications du mode de vie :
- Éviter les positions prolongées debout ou assise.
- Favoriser l’exercice physique modéré pour stimuler le retour veineux.
Pronostic
Le SCP est une condition chronique, mais avec une prise en charge appropriée, la majorité des patientes constatent une réduction significative de leurs symptômes. Les traitements interventionnels offrent des résultats durables dans la plupart des cas.
Prévention
- Suivi pendant et après les grossesses :
- Les femmes ayant des antécédents de varices pelviennes doivent être surveillées.
- Adoption d’un mode de vie sain :
- Contrôle du poids, exercices physiques réguliers.
- Traitement précoce des varices visibles :
- Pour prévenir leur progression vers une congestion pelvienne.
Références scientifiques
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- Taylor, H. C. (1949). Vascular Congestion and Pain in the Pelvis. American Journal of Obstetrics and Gynecology, 57(3), 589–598.
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