L'absence congénitale d'utérus et de vagin : le syndrome de Mayer-Rokitansky-Küster-Hauser (MRKH)
L'absence congénitale d'utérus et de vagin, connue sous le nom de syndrome de Mayer-Rokitansky-Küster-Hauser (MRKH), est une anomalie rare affectant les femmes à la naissance. Cette condition se manifeste par un développement incomplet ou une absence totale des structures dérivées des canaux de Müller, responsables de la formation de l'utérus, du col de l'utérus et du tiers supérieur du vagin. Malgré cette absence, les femmes atteintes du syndrome de MRKH présentent des caractéristiques sexuelles secondaires normales, car les ovaires et leur fonction hormonale sont intacts.
Épidémiologie
Le syndrome de MRKH affecte environ 1 femme sur 4 500 à 5 000 naissances féminines. Il est souvent diagnostiqué à l'adolescence, lorsque les jeunes filles consultent pour une aménorrhée primaire (absence de règles).
Pathophysiologie
Le syndrome de MRKH résulte d’une interruption du développement embryologique des canaux de Müller entre la 5e et la 7e semaine de gestation. Les causes précises restent mal comprises, bien qu’une composante génétique soit suspectée. Dans certains cas, des mutations ou des microdélétions dans des gènes impliqués dans le développement mullerien (par exemple WNT4, HOXA13, ou LHX1) ont été identifiées.
Classification
Le syndrome de MRKH est divisé en deux types :
- Type I (forme isolée) : Absence des structures mulleriennes, mais avec des organes adjacents (reins, colonne vertébrale) normaux.
- Type II (forme syndromique) : Anomalies associées, notamment rénales (agénésie ou ectopie), osseuses (scoliose ou anomalies vertébrales), auditives et parfois cardiaques.
Caractéristiques cliniques
Les principales caractéristiques du syndrome de MRKH incluent :
- Aménorrhée primaire : absence de règles chez une adolescente ayant des signes normaux de puberté (développement mammaire, pilosité pubienne).
- Absence de vagin fonctionnel : souvent découverte lors de la tentative d’un premier examen gynécologique ou d’un rapport sexuel.
- Présence d’ovaires normaux : les patientes ont une fonction hormonale normale et des taux d’œstrogènes suffisants pour développer des caractères sexuels secondaires.
Des anomalies associées incluent :
- Malformations rénales (30-40 % des cas) : rein en fer à cheval, agénésie rénale unilatérale ou double système collecteur.
- Malformations osseuses (10-15 % des cas) : scoliose ou vertèbres fusionnées.
- Anomalies auditives et cardiaques plus rares.
Diagnostic
Le diagnostic repose sur plusieurs étapes :
- Anamnèse et examen clinique : aménorrhée primaire chez une adolescente avec des caractères sexuels secondaires normaux.
- Imagerie : une échographie pelvienne ou une IRM confirme l'absence de structures utérines et vaginales tout en évaluant les anomalies rénales et pelviennes.
- Tests génétiques : dans certains cas, pour identifier des mutations spécifiques.
Prise en charge
La prise en charge du syndrome de MRKH est multidisciplinaire et vise à améliorer la qualité de vie des patientes. Elle comprend :
- Création d’un vagin fonctionnel :
- Techniques non chirurgicales : dilatateurs vaginaux progressifs, souvent considérés comme le traitement de première ligne.
- Chirurgie reconstructive : vaginoplastie, utilisant des techniques comme la méthode de McIndoe (greffe cutanée) ou l’utilisation de tissus intestinaux (vaginoplastie colique).
- Soutien psychologique : pour gérer l’impact émotionnel et social du diagnostic, notamment concernant la fertilité et l'identité féminine.
- Alternatives pour la maternité : bien que ces femmes ne puissent pas porter d'enfant, elles peuvent devenir mères via la gestation pour autrui (GPA) ou l’adoption, en utilisant leurs ovocytes si les ovaires sont fonctionnels.
Pronostic
Avec un accompagnement adéquat, les patientes atteintes du syndrome de MRKH peuvent mener une vie sexuelle et émotionnelle épanouie. La prise en charge précoce des aspects médicaux et psychosociaux est essentielle pour leur bien-être.
Recherche actuelle
Les efforts actuels de recherche visent à mieux comprendre les bases génétiques et moléculaires du syndrome de MRKH. Des thérapies innovantes, comme l’utilisation de cellules souches pour reconstruire un vagin fonctionnel, sont également explorées.
Références
- Morcel K, Camborieux L, Guerrier D. Mayer-Rokitansky-Küster-Hauser (MRKH) syndrome. Orphanet Journal of Rare Diseases. 2007;2:13.
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- Lermann J, Häberle L, Stenzl A, Sievert KD. Surgical options in Mayer-Rokitansky-Küster-Hauser syndrome: A systematic review. Geburtshilfe Frauenheilkd. 2019;79(2):154-163.