Le chancre mou : une maladie sexuellement transmissible causée par Haemophilus ducreyi
Le chancre mou, aussi appelé chancroïde, est une infection sexuellement transmissible (IST) causée par la bactérie Haemophilus ducreyi. Il se manifeste principalement par des ulcérations douloureuses des organes génitaux et une inflammation des ganglions lymphatiques dans l'aine. Bien que le chancre mou soit rare dans les pays développés, il reste endémique dans certaines régions d'Afrique, d'Asie, et des Caraïbes, où il contribue à la propagation du VIH en facilitant la transmission virale à travers les ulcères.
Agent pathogène
La bactérie Haemophilus ducreyi est un bacille Gram négatif qui est responsable du développement des ulcères caractéristiques du chancre mou. La bactérie envahit la peau ou les muqueuses à travers de petites lésions ou abrasions qui peuvent survenir pendant les rapports sexuels. Contrairement au chancre syphilitique, le chancre mou se distingue par ses caractéristiques douloureuses et par le fait qu'il ne guérit pas spontanément sans traitement.
Modes de transmission
Le chancre mou se transmet principalement par contact sexuel direct avec une personne infectée. La bactérie pénètre dans l'organisme par de petites lésions de la peau ou des muqueuses pendant les rapports sexuels. Le risque de transmission est accru chez les individus ayant plusieurs partenaires sexuels ou pratiquant des relations sexuelles non protégées.
La maladie est plus fréquente dans les environnements où l'accès aux soins de santé est limité et où les taux d'autres IST, telles que le VIH et la syphilis, sont élevés. Il n'y a pas de transmission congénitale ou par contact non sexuel.
Symptômes
Le chancre mou se manifeste généralement 4 à 10 jours après l'exposition à Haemophilus ducreyi. Les principaux symptômes incluent :
- Ulcération douloureuse : L'ulcère génital, typiquement unique mais pouvant être multiple, est profond, douloureux, et a des bords irréguliers. Il est souvent entouré d'une zone d'inflammation rougeâtre. Contrairement au chancre syphilitique, qui est indolore, l'ulcère du chancre mou est extrêmement douloureux et peut saigner au toucher.
- Adénopathie inguinale : L'infection provoque un gonflement des ganglions lymphatiques dans l'aine, appelés bubons. Ces ganglions peuvent devenir douloureux et s'ulcérer, libérant du pus.
- Écoulement : Les ulcères peuvent parfois produire un écoulement séro-purulent.
Les symptômes peuvent se compliquer chez les individus immunodéprimés ou co-infectés par le VIH, avec un risque accru de propagation systémique ou de surinfection bactérienne.
Diagnostic
Le diagnostic du chancre mou repose sur les caractéristiques cliniques de la lésion et des tests de laboratoire pour confirmer la présence de Haemophilus ducreyi. Cependant, le chancre mou peut être confondu avec d'autres IST présentant des ulcères génitaux, telles que la syphilis et l'herpès génital. Il est donc important d'exclure ces autres infections par des tests appropriés.
- Examen microscopique : Les prélèvements de l'ulcère peuvent être colorés par la méthode de Gram pour détecter les bacilles Gram négatifs typiques de Haemophilus ducreyi, mais cette méthode est rarement utilisée en raison de sa faible sensibilité.
- Culture bactérienne : La culture de Haemophilus ducreyi à partir de l'ulcère est la méthode de diagnostic la plus précise, mais elle nécessite des milieux de culture spécialisés.
- PCR (réaction en chaîne par polymérase) : Cette méthode de diagnostic moléculaire est de plus en plus utilisée pour identifier l'ADN de la bactérie, en particulier dans les environnements où la culture bactérienne n'est pas facilement disponible.
En raison de la complexité du diagnostic par culture ou PCR, le diagnostic du chancre mou repose souvent sur l'examen clinique et la réponse au traitement antibiotique.
Traitement
Le chancre mou peut être traité efficacement avec des antibiotiques. Le traitement permet de guérir les ulcères et de réduire le risque de complications. Les antibiotiques recommandés incluent :
- Azithromycine (par voie orale en dose unique) : Efficace contre Haemophilus ducreyi et facile à administrer.
- Ceftriaxone (injection intramusculaire unique) : Un autre traitement de première ligne pour les cas de chancre mou.
- Érythromycine (par voie orale pendant 7 jours) : Alternative dans les cas où les autres antibiotiques ne sont pas disponibles ou contre-indiqués.
- Ciprofloxacine : Recommandée en dose unique ou en traitement court, mais contre-indiquée chez les femmes enceintes et les enfants.
Le suivi médical est important pour vérifier la guérison complète, car les ulcères peuvent mettre plusieurs semaines à cicatriser. En cas de traitement tardif, les cicatrices peuvent persister, et les ganglions inguinaux peuvent nécessiter un drainage chirurgical si des abcès se forment.
Complications
Le chancre mou peut entraîner plusieurs complications s'il n'est pas traité :
- Surinfection : Les ulcères ouverts peuvent être surinfectés par d'autres bactéries, entraînant des infections plus graves.
- Formation de cicatrices : Les ulcères peuvent guérir en laissant des cicatrices visibles, en particulier après des infections prolongées.
- Propagation du VIH : En raison de la rupture de la barrière cutanée, le chancre mou augmente le risque de transmission du VIH lors des rapports sexuels non protégés.
Prévention
La prévention du chancre mou repose sur les mêmes principes que pour les autres infections sexuellement transmissibles :
- Utilisation de préservatifs : L'utilisation de préservatifs pendant les rapports sexuels réduit considérablement le risque de contracter le chancre mou et d'autres IST.
- Éducation et sensibilisation : Les programmes d'éducation sur la santé sexuelle, en particulier dans les régions où le chancre mou est endémique, sont essentiels pour sensibiliser à l'importance de la prévention.
- Traitement des partenaires sexuels : Les partenaires sexuels des personnes infectées doivent être identifiés et traités pour prévenir la propagation de l'infection.
Conclusion
Le chancre mou est une infection sexuellement transmissible rare mais potentiellement grave, causée par Haemophilus ducreyi. Il se caractérise par des ulcères génitaux douloureux et un gonflement des ganglions lymphatiques inguinaux. Bien que le diagnostic repose sur l'examen clinique, le traitement antibiotique est généralement efficace pour guérir l'infection. La prévention passe par l'utilisation de préservatifs et la sensibilisation aux pratiques sexuelles à risque.
Références
- Centers for Disease Control and Prevention (CDC). "Chancroid - 2022 STD Treatment Guidelines." CDC, 2022. Disponible en ligne.
- World Health Organization. "Sexually Transmitted Infections (STIs)." WHO, 2023. Consulté en ligne.
- Lewis, D. A. "Chancroid: Clinical Manifestations, Diagnosis, and Management." Sexually Transmitted Infections, 2003; 79(1):68-71.