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L’achalasie-alacrymie est une affection rare souvent associée au syndrome triple A (achalasie-addisonisme-alacrymie), une maladie génétique causée par des mutations du gène AAAS. Bien que le syndrome triple A englobe plusieurs manifestations systémiques, certaines formes limitées impliquent uniquement l’achalasie et l’alacrymie, sans insuffisance surrénalienne. Cette présentation partielle est parfois désignée sous le terme d’achalasie-alacrymie et se caractérise principalement par des troubles de la déglutition et une sécheresse oculaire.

I. Physiopathologie

L’achalasie-alacrymie est liée à un dysfonctionnement des systèmes exocrines et neurologiques autonomes.

  1. Mutation du gène AAAS :
    • Le gène AAAS, situé sur le chromosome 12q13, code pour une protéine appelée alacryline, localisée dans les complexes de pores nucléaires. Cette protéine joue un rôle clé dans la régulation des fonctions autonomes, notamment dans les tissus innervés par le système nerveux autonome.
    • Les mutations altèrent la fonction des glandes exocrines (comme les glandes lacrymales) et des muscles lisses (comme ceux de l’œsophage).
  2. Achalasie œsophagienne :
    • L’achalasie est due à un défaut de relaxation du sphincter inférieur de l’œsophage (SIO), causé par une dégénérescence des neurones myentériques dans l’œsophage.
    • Cette anomalie entraîne une obstruction fonctionnelle, responsable des troubles de la déglutition.
  3. Alacrymie :
    • La diminution ou l’absence de sécrétion lacrymale est causée par une défaillance des glandes lacrymales, probablement liée à une dysfonction du système nerveux autonome qui les contrôle.

II. Manifestations Cliniques

Les symptômes d’achalasie-alacrymie apparaissent souvent dès l’enfance et peuvent varier en intensité.

1. Alacrymie :

  • La réduction ou l'absence de larmes est souvent le premier signe détecté, apparaissant dès la petite enfance.
  • Symptômes associés :
    • Sécheresse oculaire chronique, entraînant des irritations oculaires et une sensibilité accrue à la lumière.
    • Risque accru d’infections oculaires (kératite, conjonctivite).
    • Vision floue et inconfort.

2. Achalasie œsophagienne :

  • Apparition progressive de symptômes liés à des troubles de la déglutition :
    • Dysphagie (difficulté à avaler) pour les aliments solides, puis liquides.
    • Régurgitations fréquentes, avec risque de pneumopathies d’inhalation.
    • Douleurs thoraciques ou rétrosternales.
    • Perte de poids et retard de croissance chez l’enfant.

3. Manifestations associées potentielles :

  • Bien que non systématiques dans les formes limitées, des symptômes neurologiques autonomes légers peuvent survenir, tels qu’une hypotension orthostatique ou une réduction de la transpiration.

III. Diagnostic

Le diagnostic repose sur une combinaison de signes cliniques, de tests fonctionnels et, parfois, d’analyses génétiques.

  1. Tests oculaires :
    • Test de Schirmer : Mesure de la production lacrymale pour confirmer l’alacrymie.
    • Examen à la lampe à fente pour détecter des lésions cornéennes liées à la sécheresse oculaire.
  2. Explorations œsophagiennes :
    • Manométrie œsophagienne : Test clé pour diagnostiquer l’achalasie, montrant un défaut de relaxation du sphincter inférieur de l’œsophage et une absence de contractions péristaltiques.
    • Transit baryté : Montre une dilatation de l’œsophage avec un rétrécissement en « bec d’oiseau » caractéristique au niveau du SIO.
    • Endoscopie pour exclure une cause mécanique (comme une sténose).
  3. Analyse génétique :
    • Recherche de mutations dans le gène AAAS pour confirmer le diagnostic, surtout si d’autres membres de la famille sont atteints.

IV. Prise en Charge

La prise en charge de l’achalasie-alacrymie est multidisciplinaire, avec des approches visant à traiter les symptômes et à prévenir les complications.

1. Traitement de l’alacrymie :

  • Larmes artificielles pour hydrater les yeux, utilisées régulièrement tout au long de la journée.
  • Gels ou pommades ophtalmiques pour une hydratation prolongée, notamment la nuit.
  • Surveillance ophtalmologique pour prévenir ou traiter les infections cornéennes et autres complications.

2. Traitement de l’achalasie :

  • Approches non chirurgicales :
    • Dilatation pneumatique du SIO pour réduire l’obstruction.
    • Injections de toxine botulique pour diminuer le tonus du sphincter (efficacité temporaire).
  • Approches chirurgicales :
    • Myotomie de Heller (procédure laparoscopique pour sectionner le SIO).
    • En cas de myotomie, une fundoplicature peut être réalisée pour prévenir le reflux gastro-œsophagien.
  • Adaptation diététique : Consommer des aliments liquides ou semi-liquides pour réduire les difficultés alimentaires.

3. Soins complémentaires :

  • Surveillance de la croissance et de la nutrition chez les enfants atteints.
  • Suivi psychologique en cas d’impact émotionnel lié aux symptômes chroniques.

V. Pronostic

Bien que l’achalasie-alacrymie soit une affection chronique, une prise en charge précoce et adaptée permet d’améliorer considérablement la qualité de vie des patients. L'alacrymie peut être bien contrôlée avec un traitement symptomatique, tandis que l'achalasie nécessite souvent des interventions répétées pour maintenir une bonne fonction œsophagienne.

VI. Recherche et Perspectives

  1. Études génétiques :
    • Identification de mutations spécifiques pour mieux comprendre les mécanismes sous-jacents et potentiellement développer des thérapies ciblées.
  2. Développement de traitements innovants :
    • Techniques avancées de chirurgie mini-invasive pour l’achalasie.
    • Recherche sur des substituts lacrymaux biologiques ou des implants stimulants la production lacrymale.
  3. Base de données sur les maladies rares :
    • Les collaborations internationales et la mise en place de registres spécifiques permettent une meilleure compréhension des variantes phénotypiques de la maladie.

Références

  1. Allgrove, J., et al. (1978). Familial Glucocorticoid Deficiency Associated with Achalasia of the Cardia and Deficient Tear Production. Lancet, 311(8067), 1284-1286.
  2. Kim, Y. S., et al. (2014). Clinical and Genetic Features of Triple A Syndrome in Pediatric Patients. Journal of Pediatric Endocrinology and Metabolism, 27(7-8), 677-684.
  3. Bozkurt, D., et al. (2018). Triple A Syndrome: Clinical and Genetic Characteristics and Long-Term Follow-Up of Patients. Journal of Clinical Endocrinology & Metabolism, 103(8), 3083-3091.
  4. Huebner, A., et al. (2000). Triple A Syndrome: Genotype-Phenotype Relation, Neurological Symptoms, and Long-Term Outcome. Brain, 123(9), 2156-2164.
  5. Prpic, I., et al. (2003). Triple A Syndrome: Clinical and Molecular Findings in Five Families with Six Novel Mutations in the AAAS Gene. European Journal of Human Genetics, 11(12), 872-876.

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